Drôle de titre pour cette première chronique du Coin du Vétérinaire. C’est toutefois ce qui me vient à l’esprit en abordant le thème de cette première discussion : la vitesse d’action des antibiotiques pour le traitement des maladies respiratoires.
Est-ce qu’un antibiotique qui agit « rapidement » donne de meilleurs résultats? C’est une allégation que vous entendez régulièrement et qui vaut la peine qu’on s’y attarde.
D’abord que signifie « vitesse d’action » pour les problèmes respiratoires. Du point de vue pharmacologique, c’est le temps nécessaire pour atteindre la concentration efficace dans les poumons contre les bactéries visées. Par exemple, pour Pasteurella multocida, Draxxin atteint cette concentration en 1 heure tandis que Nuflor y parvient en « moins d’une heure » selon la publicité. Or, on n’a pas vérifié si Draxxin y parvenait lui aussi en moins d’une heure parce qu’il ne semble pas y avoir d’intérêt clinique pour le faire comme nous le verrons plus loin.
« Vitesse d’action » pourrait aussi vouloir dire combien de temps pour que les animaux montrent une amélioration de leur état. Aucune étude scientifique n’a été publiée à notre connaissance pour documenter une différence à cet égard entre les antibiotiques couramment utilisés pour le traitement des maladies respiratoires.
La température est l’indicateur le plus souvent mentionné pour évaluer l’évolution de la maladie après le traitement. Même si elle est un critère important pour identifier les animaux nécessitant un traitement, la recherche démontre par contre clairement qu’elle est peu utile pour évaluer le succès ou l’échec. Elle est même un mécanisme de défense naturelle dans le cas des infections virales. Si vous disposez d’une balance, le gain de poids est le meilleur moyen de prédire le succès du traitement des maladies respiratoires selon le Dr. Mike Appley de l’Université du Kansas.
Une étude plus récente a appuyé cette recommandation. L’administration de flunixine à 250 veaux au moment du 1er traitement antibiotique n’a pas amélioré le taux de récidive et le taux de mortalité, par rapport à 250 veaux qui n’avaient reçu que l’antibiotique. Le gain moyen quotidien de ces veaux n’a pas non plus été différent entre ces 2 groupes de traitement. En conclusion, la diminution rapide des signes cliniques dans cette étude n’a pas présenté d’avantage médical ou économique.
La recherche sur le traitement des maladies respiratoires s’intéressent à des indicateurs qui ont un intérêt économique plus certain pour les producteurs : le taux de mortalité, le taux de succès d’un premier traitement ou le nombre d’animaux traités redevenus normaux à la fin d’une période d’observation entre autres.
Selon les rapports publiés à ce jour, lorsque Draxxin a été administré comme premier traitement à des veaux n’ayant pas reçu d’autre médication depuis leur entrée en parc, il a constamment eu un avantage pour ces paramètres par rapport à Nuflor et Micotil. Cet avantage est attribué à la longueur de la période de traitement obtenue (10-14 jours selon les agents impliqués) avec une seule injection.
Il n’y a donc pas d’indication sérieuse que la vitesse pour obtenir une concentration efficace au poumon présente un intérêt cliniquement. Cependant, autant la recherche que l’expérience clinique montre clairement que la durée de l’action de Draxxin a un intérêt certain en termes de succès au traitement selon les paramètres que nous avons mentionnés.
La fable de Lafontaine est donc toujours actuelle : dans la course contre les maladies respiratoires, il est plus important de partir de la bonne façon vers l’objectif, un animal guéri et qui se développe normalement, que de « courir » vers un objectif incertain comme la disparition de symptômes.