Le projet Agriclimat prépare les agriculteurs québécois aux changements climatiques

Les vagues de chaleur devraient devenir plus fréquentes dans la région de la Montérégie au Québec, ce qui créera des problèmes potentiels pour la production future de fourrage. Les producteurs de fourrage du Québec ont participé à l’élaboration de plans d’adaptation aux changements climatiques axés sur les agriculteurs

Tiré de canadiancattlemen.ca – par Piper Whelan – Publié le 14 février 2022
| Traduction et adaptation libre par la rédaction |

Les données sur le changement climatique pour cette région agricole prévoient une augmentation du nombre de jours avec des températures nocturnes supérieures à 20 °C, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur la respiration des plantes qui dépendent des nuits plus fraîches pour survivre aux étés chauds.

À l’aide de prévisions climatiques régionales comme celle-ci, des agriculteurs de la Montérégie et d’ailleurs au Québec ont participé à l’élaboration de plans d’adaptation aux changements climatiques dans le cadre du projet Agriclimat de la province.

« Je pense que les inquiétudes des producteurs sont tout à fait légitimes », déclare Sylvestre Delmotte, agronome et consultant pour Agriclimat, s’exprimant par l’intermédiaire d’un traducteur lors de la conférence 2021 de l’Association canadienne des fourrages et des prairies en décembre.

« Les conséquences du changement climatique deviennent claires. Ce que nous faisons au Québec, c’est essayer d’amener les gens à agir plutôt qu’à simplement réagir avant que ces conséquences ne deviennent trop importantes.»

Financé en partie par le gouvernement du Québec, Agriclimat a été créé en 2017 pour comprendre les impacts potentiels des changements climatiques sur la production agricole de la province et développer des outils pour aider les producteurs à s’adapter à ces nouvelles réalités tout en restant compétitifs.

Dans la première phase du projet, allant de 2017 à 2020, des groupes de travail composés de producteurs et d’autres intervenants ont été créés pour 10 régions de la province. Ouranos, une organisation de climatologie basée au Québec, a partagé avec ces groupes les projections des changements climatiques pour chaque région.

« C’est dans chacune de ces régions que ces scénarios climatiques ont été analysés, et à partir de cette analyse, nous examinons les mesures d’adaptation possibles qui pourraient être mises en place dans les fermes », explique M. Delmotte.

Dans l’exemple de la Montérégie, les données d’Ouranos prédisent d’autres défis à la production fourragère durant la saison de croissance. Les précipitations estivales totales, qui varient d’une année à l’autre, pourraient ne pas changer radicalement à l’avenir, rapporte M. Delmotte, mais il pourrait y avoir des périodes plus longues sans pluie.

« Si on regarde plus en détail pour St-Hubert, qui est une municipalité de la Montérégie… on s’attend à ce que le nombre de fois où il y aura une période de cinq jours sans pluie va augmenter. Cela passera de 10 fois par an à 12 fois par an », dit-il.

Une augmentation de l’évapotranspiration, due à des températures plus élevées, pourrait également se produire dans cette région. «Lorsque nous mettons cela ensemble, les précipitations stables mais plus d’évapotranspiration que ce à quoi nous nous attendions en moyenne… il y aura un déficit en eau.»

Des journées plus douces pendant l’hiver pourraient menacer le processus d’endurcissement, tout comme les chutes ultérieures et les printemps précoces. Cependant, les données suggèrent moins de jours de froid extrême – avec des températures inférieures à -25 ° C – tout au long de l’hiver.

Des changements sont également attendus dans la couverture de neige, un autre facteur affectant la survie hivernale des plantes vivaces fourragères.

«Historiquement, nous sommes environ 120 jours par an avec une couverture de neige importante, et ce que nous pouvons voir, c’est qu’il y aura une réduction d’environ 40 jours», dit-il, notant que cela est dû à la fois aux températures plus élevées et à plus de pluie en hiver. «Cette pluie formera de la glace sur la neige, mais fera également fondre de la neige et réduira la protection offerte par la couche de neige.»

Se préparer à l’évolution des conditions
Une fois les projections de changement climatique présentées aux groupes de travail régionaux, les producteurs et les autres parties prenantes ont discuté des effets possibles sur la production, tels que l’augmentation de l’érosion des sols due à des précipitations plus intenses et une plus grande probabilité de mauvaises herbes, de ravageurs et de maladies. Les groupes de travail ont ensuite proposé des idées de mesures d’adaptation potentielles.

«Nous avons fait un travail pour essayer de valider les idées des producteurs pour voir si, en termes de recherche ou de projets déjà réalisés, nous pouvions obtenir des informations qui viendraient compléter les hypothèses ou valider les hypothèses avancées par les producteurs et les autres parties prenantes», explique Sylvestre Delmotte.

Par exemple, les idées liées à la production de fourrage incluent le choix de mélanges plus complexes pour une plus grande résilience et différentes espèces pour mieux s’adapter aux conditions changeantes. Des études menées dans les stations de recherche d’Agriculture et Agroalimentaire Canada du Québec ont été comparées aux idées des producteurs.

« Des travaux sont en cours sur le climat futur concernant la gestion des mélanges de luzerne et de fléole des prés… Comme la saison de croissance sera plus longue, il y aura une coupe supplémentaire, ce qui devrait nous permettre d’obtenir plus de rendement que ce que nous observons actuellement en Montérégie pour les mélanges fléole des prés-luzerne », dit-il, notant que l’accent pourrait être mis sur la luzerne, car les études suggèrent que la fléole des prés pourrait ne pas s’adapter aussi bien.

«La fétuque semblait être l’espèce qui ferait le mieux avec la luzerne après le changement climatique, mais les augmentations que nous pourrions observer à court terme par opposition à plus long terme ou l’impact des températures plus élevées vont probablement empêcher de continuer à obtenir des gains de productivité. Ces études confirment à bien des égards les hypothèses des producteurs.»

Cet engagement et cette recherche des producteurs ont ensuite éclairé les plans d’adaptation agricole aux changements climatiques pour chaque région du Québec. Les plans d’adaptation énoncent « les impacts des changements climatiques sur l’agriculture et proposent des mesures d’adaptation à l’échelle des entreprises agricoles individuelles, de la région et de l’ensemble de la province », selon le site Web d’Agriclimat.

La deuxième phase du projet, qui s’étend de 2021 à 2024, déterminera les mesures à mettre en œuvre pour faire face à des menaces spécifiques, ainsi que les efforts de test pour accroître la résilience des exploitations. Trente-sept fermes pilotes ont rejoint le projet fin 2021.

« Nous développons également un outil pour évaluer la vulnérabilité au changement climatique et les émissions de gaz à effet de serre et la séquestration du carbone au niveau de la ferme », explique Sylvestre Delmotte.

« Cet outil sera offert aux producteurs afin que les fermes individuelles puissent vraiment voir où elles sont vulnérables et ce qui peut être fait pour être moins exposées à l’impact du changement climatique et aussi réduire les gaz à effet de serre.»

D’autres projets liés à l’adaptation aux changements climatiques sont en cours au Québec, dont des essais d’irrigation de peuplements fourragers et de nouvelles formations d’agronomes.

Source : https://www.canadiancattlemen.ca/crops/forages/agriclimat-project-preparing-quebec-farmers-for-changing-climate/