Article Pfizer – L’utilisation rationnelle des antibiotiques – 26-08-2013

Lors de la dernière réunion annuelle de la SPEQ, le 10 août dernier, le Dr André Cécyre a présenté une conférence dont le thème était » l’utilisation rationnelle des antibiotiques pour le traitement des maladies respiratoires en parc d’engraissement ». En tant que consultant pour la Fédération des producteurs de Bovins du Québec (FPBQ), Dr Cécyre est un témoin privilégié des pratiques de l’industrie pour le traitement des maladies au parc et un interlocuteur crédible pour les commenter. Cette chronique reprend plusieurs éléments importants de sa discussion.

Les antibiotiques disponibles sont nombreux

Parmi les nombreux produits disponibles sur le marché, la plupart sont apparus au cours des 10 dernières années. La sélection de l’antibiotique approprié pour le traitement de veaux malades ou pour la prévention à l’arrivée est donc un problème relativement nouveau.

Leur composition chimique les répartit en 5 grandes familles listées dans le tableau ci-contre. Tous ces produits ont des caractéristiques particulières qu’il est important de connaître pour pouvoir faire les bons choix.

Le Bureau des Médicaments Vétérinaires de Santé Canada règlemente les indications thérapeutiques de tous les médicaments vétérinaires après avoir revu et approuvé les données scientifiques requises auprès des manufacturiers.

Indications sur l’utilisation des antibiotiques

Pour les maladies respiratoires des bouvillons d’engraissement, Santé Canada distingue 2 formes de traitement avec un antibiotique. Premièrement, le traitement des animaux malades: tous les antibiotiques listés dans le tableau possèdent une indication thérapeutique qui identifie les agents bactériens pour lesquels ils ont démontré une efficacité.

L’administration d’un antibiotique peut aussi avoir pour but de diminuer la propagation de la maladie (« réduire la morbidité » sur l’étiquette) dans un groupe d’animaux où le risque est élevé. Dans ce cas, tous les animaux à risque reçoivent l’antibiotique au moment de leur arrivée. Encore là, les agents bactériens contre lesquels cette utilisation est efficace sont identifiés. Au Canada, seuls les 4 antibiotiques du groupe des Macrolides ont une indication pour le traitement à l’arrivée des veaux à risque élevé. Il est important de rappeler que l’efficacité de ces antibiotiques a été testée sur des veaux traités au moment de leur arrivée. Un délai dans leur administration peut donner des résultats différents et souvent décevants. Notez aussi que les Tétracyclines et EXCEDE 200 n’ont pas d’indication pour le traitement à l’arrivée au Canada.

Utilisation rationnelle des antibiotiques

En examinant les dossiers des entreprises qui utilisent le logiciel Bovitrace, le Dr. Cécyre constate que les stratégies de traitement avec des antibiotiques mériteraient souvent une révision pour en optimiser les résultats. Il donne d’ailleurs plusieurs bonnes raisons de le faire.

L’efficacité:

Le mode d’action des membres de chaque famille est similaire pour les bactéries contre lesquelles ils présentent une efficacité. S’il est nécessaire de retraiter, l’utilisation d’un antibiotique d’une autre famille est recommandable pour combattre l’infection par un mode d’action différent. Par exemple, le traitement initial avec Draxxin suivi d’une dose de Zactran, Zuprevo ou de Micotil n’est pas une bonne stratégie thérapeutique.

L’activité contre Mycoplasma bovis, une complication fréquente des problèmes respiratoires des veaux à risque élevé, varie entre les antibiotiques et influence beaucoup l’efficacité des traitements selon les résultats de recherche. Draxxin est le seul antibiotique avec une indication approuvée pour M. bovis, à la fois pour la réduction de la morbidité (i.e. traitement à l’arrivée) et pour le traitement des veaux malades. L’expérience sur le terrain et les résultats de recherche clinique montrent que son administration en 1ère ligne diminue de façon importante le nombre de récidives, de cas chroniques et de mortalités par rapport aux autres antibiotiques de sa classe.

Finalement, la recherche clinique a bien démontré que l’interruption précoce (i.e. < 5 jours) d’une antibiothérapie est une cause importante d’échec des traitements en favorisant l’apparition des infections secondaires responsables des cas « chroniques ». C’est une des raisons qui a déclenché, au cours des années ’90, la recherche d’un antibiotique à action prolongée permettant d’effectuer un traitement complet avec une seule injection. L’utilisation en 1ère ligne d’un antibiotique à action prolongée et efficace contre Mycoplasma bovis procure la plus grande efficacité pour le traitement des maladies respiratoires chez les bovins.

Le coût:

La sélection de l’antibiotique et le plan pour l’administration des traitements ont un impact important sur le coût des traitements que vous effectuez.

Par exemple, l’administration consécutive d’antibiotiques à action prolongée comme Draxxin, Zactran ou Zuprevo est coûteuse en plus d’avoir une efficacité discutable à cause de la similitude de leurs modes d’action. Cette stratégie est donc économiquement et médicalement injustifiable. L’administration d’Excede ou d’un florfénicol à la suite d’un macrolide est, d’un point de vue médical, mieux avisé.

À cet égard, une étude clinique récente dans l’ouest canadien démontre que l’administration d’EXCEDE 200 ou de Resflor au 1er traitement, chez des veaux traités avec Draxxin à l’arrivée, a donné des résultats équivalents à un coût environ 40% moins élevé pour EXCEDE 200. Le coût d’un traitement à l’arrivée, efficace pour la prévention des complications par M.bovis, peut donc être amorti en sélectionnant un produit moins dispendieux lors du 1er traitement.

Un choix logique pour les veaux qui doivent être retraités serait un antibiotique de la classe des quinolones comme A180. Rappelons que l’étiquette de cette classe d’antibiotiques précise qu’ils ne doivent pas être utilisés lors du 1er traitement de vos veaux, compte tenu de leur importance en santé humaine.

Les antibiotiques à action prolongée offrent une opportunité de diminuer le coût des traitements en permettant de retarder le traitement suivant lorsqu’il est nécessaire et cela, sans affecter le taux de succès. On désigne cette période d’attente comme « intervalle post traitement » ou IPT. Une étude sur plus de 11000 veaux à risque élevé, dans l’ouest canadien, a démontré cette possibilité pour Draxxin, administré à l’arrivée, en comparant des IPT de 3 et 14 jours. Le % de morbidité (veaux malades une première fois après l’IPT alloué) et le % de mortalité n’ont pas varié significativement entre les 2 protocoles testés. On peut facilement imaginer le bénéfice économique potentiel d’incorporer un IPT prolongé au-delà de 3 jours dans les protocoles thérapeutiques.

Le développement de l’antibiorésistance.

Qu’on aime ou pas, cette réalité préoccupe de plus en plus les autorités sanitaires et le grand public. Les productions animales seront de plus en plus scrutées pour leur utilisation des médicaments. Dans cette perspective, il devient important de n’utiliser les antibiotiques que lorsqu’ils sont médicalement justifiables, selon les recommandations de leur étiquette et avec une stratégie bien pensée.

A cet égard, le Dr. Cécyre déplore que le module Vet Expert de Bovitrace ne soit pas plus utilisé. Ce module permet de catégoriser avec plus d’objectivité le risque de maladie respiratoire pour les veaux qui entrent au parc et de développer un plan thérapeutique adapté aux besoins de ces veaux, en collaboration avec le médecin vétérinaire.

En conclusion

L’impact de la gestion de la santé des veaux d’embouche va bien au-delà du coût des traitements. En fait, ceux-ci ne représentent qu’environ 20% des conséquences économiques des maladies respiratoires pendant l’engraissement. Le reste étant constitué de l’impact sur les performances de croissance et sur la qualité des carcasses. En 2006, considérant toutes les conséquences des maladies respiratoires, une analyse économique en avait estimé le coût à $13.90 par veau entrant au parc: en dollars de 2013 et multiplié par le nombre de veaux de votre entreprise, ça donnerait quoi ?

Le Dr. Cécyre estime qu’il n’est plus possible de gérer un aspect aussi important, pour des entreprises comprenant souvent des milliers d’animaux, avec « un calepin dans nos poches ». Un dossier informatisé bien tenu est devenu la norme pour cette industrie.

Bovitrace a été développé à cette fin avec le support des producteurs de bœuf du Québec et de partenaires comme Zoetis. Ce logiciel peut, selon lui, contribuer significativement à l’utilisation rationnelle des antibiotiques en fournissant des moyens d’identifier les veaux qui ont besoin d’une attention particulière à l’arrivée, en facilitant la conception et l’application des programmes thérapeutiques développés en collaboration avec le médecin vétérinaire et finalement, par l’analyse des performances de l’élevage.

•Paul Baillargeon DVM MSc
Chef des services techniques, Zoetis
• Publié le 26-08-2013